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L’idée originelle du Challenge Naviguer léger (CNL) était de prouver que l’on pouvait envisager des navigations « ambitieuses » avec de petits bateaux, dans l’esprit du Dinghy Cruising, et de comparer différents supports et la façon de les utiliser. L’édition 2024 a parfaitement répondu à cette attente : pour les dix ans du challenge, Gilles Montaubin, cheville ouvrière du groupe, a concocté un programme bien sportif : le tour de deux îles, Yeu et Noirmoutier. L’éventail des bateaux présents allait du plan Montaubin Lili 6.10, fourchette haute du voile-aviron, au Viola 4, canoë à voile minimaliste de 4,30 mètres sur plan Storer, dont la pratique en haute mer relève du militantisme ! La flotte était aussi répartie entre les modernes – les plans Montaubin, le gis de Storer, le Hobie Cat 16 modifié de Jean-David Benamou et le rog 15 de William Pieters – et les traditionnels : les plans Vivier, Silmaril et Illur, le petit et lourd Carantec 12 pieds de Patrick Menneteau, le Penobscot 17, le Pathfinder de Lorenzo Brigone, nouveau venu cette année, et le Major, plan Silvant des années 1960.
La flottille s’est retrouvée au pied du pont de Noirmoutier le dimanche 23 juin au soir, sur la cale gratuite de la pointe de la Fosse. À 8 h 30, le lendemain matin, tout le monde est sur l’eau, cap sur Yeu avec du soleil et 5 nœuds de vent d’est. Mais le vent est à terre et, à mi-chemin, il faut sortir les avirons pendant au moins deux heures. Comme d’habitude et malgré les bonnes résolutions, les différences des bateaux et les choix de route éparpillent la flottille.
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©Stéphane Blanc
Enfin, la côte îlienne se profile au fur et à mesure que le vent revient par l’ouest. Un regroupement se fait à la pointe des Corbeaux avant de remonter sur le minuscule port de la Meule, sur la côte ouest de l’île. Le vent étant passé nord-ouest, nous louvoyons vers cet abri invisible depuis la mer, signalé par la chapelle de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle. À 19 heures, tout le monde est au port pour un apéro-débriefing bien mérité !
Le lendemain, nous terminons le tour de l’île par l’ouest et sa côte sauvage. Après avoir passé la pointe du But, et les chiens Perrins pour certains, nous mettons cap à l’est. Une partie de la flotte reste à Port-Joinville, et l’autre file vers la plage de la Tourrette pour le bivouac de la nuit.
Le mercredi, il nous faut retraverser et rentrer dans le goulet de Fromentine pour passer le Gois, resté jusqu’à la construction du pont le seul accès routier à l’île. La brise de nord-est très faible se renforce à l’arrivée sur la côte vendéenne. À 15 heures, le regroupement se fait sur le banc de Boisvinet à l’entrée du chenal pour attendre les retardataires et la renverse. À 17 heures, le banc est recouvert par le flot. Nous repartons vers le Gois qui n’est pas franchissable avant 18 heures.
Une fois cet obstacle passé, la baie de Bourgneuf s’offre à nous. Nous mettons le cap sur la pointe de Saint-Pierre et la plage qui longe le fameux Bois de la Chaise, théâtre de fameuses régates. Nous remontons péniblement la côte est de Noirmoutier avec un vent qui se renforce à 15 nœuds, au-dessus et entre les nombreux parcs à huîtres, à peine couverts par 1,50 mètre d’eau.
À 21 heures, les premiers atteignent la plage. Patrick sur son Carantec arrive à 23 heures, alors que trois bateaux choisissent de passer la nuit à l’ancre au sud du chenal de Noirmoutier-en-l’Île. Nous sommes fatigués mais comblés par cette grosse journée de 35 milles. Nous avons des images plein la tête, embellies par la météo qui nous gâte encore cette année.
Le 27 juin, nous quittons le Bois de la Chaise pour effectuer la jonction avec ceux qui étaient restés au mouillage, et faire route au nord-ouest sur le port de L’Herbaudière. Le vent est toujours au nord-ouest, entre 15 et 20 nœuds, avec un peu de mer. Une rafale plus forte sera fatale à Jean-David et à son catamaran : il démâte peu avant la Potée de Beurre, mais sans casse sérieuse ; il roule son gréement et rejoint rapidement à l’aviron la plage de la Linière à l’est du port où il peut réparer.
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©Stéphane Blanc
Au regroupement de midi à L’Herbaudière, nous dégustons une bonne bière fraîche ! Ensuite, nous repartons sur Pornic où nous arrivons à 16 heures, après un long bord de largue, ponctué de belles glisses sur les vagues formées par les 18 nœuds établis. Là encore, la flotte se divise, certains allant cabaner dans la rivière de Pornic, alors que d’autres choisissent les douches de la marina ! Le vendredi 28 juin, il faut songer au retour. Deux options s’offrent à nous : traverser la baie de Bourgneuf et descendre le long de Noirmoutier en refranchissant le Gois, ou bien faire le tour complet de l’île par l’ouest et rentrer à nouveau par le goulet de Fromentine. Cette deuxième option, séduisante et bien servie par 10 à 15 nœuds de vent de nord-ouest, est celle que prennent deux plans Montaubin qui avaleront, sous gennaker, les 27 milles en cinq heures, à 5,5 nœuds de moyenne…
Stéphane Blanc