En1875, un chantier construit à Gravelines un bateau de 79,69 tonneaux puis, l’année suivante, un sloup-dundée de 78,68 tonneaux. Classés « dundées » par la douane, (et sloups armés au cabotage par la marine), ces navires à deux mâts apparaissent comme les proches cousins du sloup dont ils vont encore améliorer les qualités de bateau à tout faire. Parallèlement, à Boulogne, où la pêche est en pleine expansion dans les années 1880, les chalutiers s’agrandissent pour exploiter les fonds de pêche plus éloignés et la division de la voilure s’impose. L’Isabelle , B 1826, lancé en 1886, équipé d’un treuil à vapeur, semble être le premier dundée chalutier du port.
La dernière décennie du XIXe siècle va confirmer la supériorité du dundée sur les lougres ou les sloups à tapecul. La coque s’affine, le plan de dérive augmente, le maître-bau recule, les voûtes se tendent, même si elles restent un peu plus massives à Boulogne : ces bateaux marchent bien à toutes les allures, serrent bien le vent, virent aisément et étalent mieux le gros temps. La voilure se compose d’une grande voile à corne sur gui, plus foc, trinquette et flèche, gréés sur mâts à pible. Le dundée l’emporte définitivement à Gravelines, le dernier lougre étant lancé en 1898.
Les dimensions moyennes du dundée gravelinois s’établissent autour de 16 mètres de long, pour environ 22 tonneaux de jauge nette. Mais les chantiers lancent aussi, pour la Grande Pêche en Islande, plusieurs dundées d’une soixantaine de tonneaux, qui se comportent remarquablement dans les mers septentrionnales. A Boulogne, dans les années 1890, on construit chaque année une douzaine de dundées chalutiers, de 60 à 70 tonneaux, pour atteindre 105 unités en 1896 ! D’autres ports (Le Crotoy, Calais, Ostende) s’inspirent de ces coques, mais conservent souvent des voiles au tiers, ou rachètent en seconde main des dundées chalutiers boulonnais.
Le dundée gravellinois pratique toutes les pêches saisonnières, chalut à bâton, filets dérivants, cordes dans les eaux du détroit et la pêche hauturière à la ligne dans les mers du Nord. De mi-avril à mi-août, avec un équipage de 7 à 8 hommes, ils pêchent la morue entre les 57e et 61e parallèles. Certains montent jusqu’aux Féroé, voire jusqu’à l’Islande, une témérité qui se paie parfois au prix fort.
A Boulogne, les dundées chalutiers pratiquent aussi la pêche aux cordes (lignes de fond), aux lignes traînantes, aux filets dérivants en plus du chalut à bâton. Comme leurs homologues gravelinois, ils semblent parfois aussi se livrer à la pêche de la morue au Dogger Bank, qui offre du travail en morte saison, de mai à août. Avec 7 à 10 hommes, le chalutier à voiles fait des marées d’une semaine, rarement à plus d’une journée de route de Boulogne, sur les côtes anglaises jusqu’à Start Point, sur les côtes normandes et au Sud de la mer du Nord. Selon la pêche, la mer et les vents, il débarque son poisson à Boulogne, Calais, Dunkerque ou Ostende. Les dundées chalutiers pêchent en s’aidant des vents et des courants, à l’aide d’un chalut dont la perche mesure 10 à 12 mètres de largeur et repose sur deux meulettes (patins métalliques), qui donnent au chalut une ouverture verticale de moins d’un mètre. L’essentiel de la pêche est donc constitué de poissons plats, soles, turbots, carrelets, et autres poissons de fond, rougets, congres.
Durement concurrencés par les chalutiers à vapeur, pénalisés par l’épuisement des fonds de pêche, les dundées chalutiers disparaissent avant 1914, tandis que les dundées gravelinois s’adaptent facilement au moteur, après la Première Guerre mondiale.