Par Adrian G. Osier - Avec cet article d'Adrian G. Osier, conservateur du Tyne and Wear Museum, et auteur d'une remarquable monographie sur les bateaux des Shetland, Le Chasse-Marée ouvre le premier volet d'une enquête originale, qui se poursuivra sur plusieurs numéros. Avec une idée directrice : pousser plus loin qu'à l'ordinaire la démarche d'acquisition et de partage des connaissances, allier théorie et pratique, pour tenter de comprendre en profondeur un type de bateau traditionnel. Pour cela, il fallait une embarcation de taille raisonnable, pas trop coûteuse à construire, à la fois typée localement et représentative d'une grande tradition de construction navale, remarquable par son esthétique, son gréement et ses performances, et qui ait déjà fait l'objet d'une étude approfondie. La yole de Ness, aux îles Shetland, véritable archétype du bateau à clins Nord-européen, s'est imposée logiquement. Et puis, avouons-le, nous avions eu le coup de foudre ! Cette tentative d'approche globale s'articule en trois grandes parties : — Une étude historique et ethnographique menée par l'un des tout meilleurs chercheurs universitaires britanniques, publiée dès ce numéro. — Une étude technique basée sur la construction réelle de deux bateaux et rédigée par le charpentier lui-même (Gerd Lôhmann, actuellement à la Fosen Folkehog skole en Norvège). Le Chasse-Marée a tenu à ce que ces constructions soient menées avec un réel souci de communication : la première yole, An Alarc'h, réalisée dans le cadre d'un stage aux Ateliers de l'Enfer à Douarnenez, a permis de former deux jeunes charpentiers français à la technique du clin. La seconde, Morvran, a été montée sur un chantier itinérant, de façon à faire découvrir "en direct" à un très vaste public une technique de charpente vieille de plus de mille ans et toujours d'actualité, lors de "Voile Aviron Cancale", des fêtes de Paimpol ou des "Voiles de la Liberté" à Rouen. Une séquence grandeur réelle de la construction est en outre exposée au Musée du Bateau. — Une étude du comportement sous voile et à l'aviron basée sur deux années de navigation intensive en toutes saisons, par tous les temps et sur une dizaine de plans d'eau différents, du Rocher de Cancale au chenal de l'île de Batz, et des cailloux de la côte bigoudène aux eaux calmes de la Laïta ou du marais de Brière.
