Apprenti en troisième et dernière année à l’école de formation de l’association Albaola, basée à Pasaia, au Pays basque, Saul Hoffmann s’est lancé en février dernier, avec l’aide d’une autre apprentie, Ioanna Moutousidi, dans la construction d’un s’ciopon, d’après un relevé établi par Gilberto Penzo. À l’origine, le nom s’ciopon évoque un énorme fusil pesant près de 80 kilogrammes, utilisé pour la chasse au canard sur la lagune jusqu’à son interdiction dans les années 1970. Il a été donné au type de bateau à fond plat, de 5 à 6 mètres de long, sur lequel il était embarqué. Nageant « à la valaisanne », debout avec deux grands avirons croisés passés dans des forcole, le chasseurs s’approchait de ses proies, puis s’accroupissait dans son s’ciopon, pagayant alors avec un petit aviron appelé palina.
Faute de place au début du chantier, les deux charpentiers ont commencé par les forcole, sculptées dans du châtaigner, pour la forme desquelles ils se sont inspirés d’une image tirée du livre que le spécialiste vénitien Saverio Pastor a consacré à ces tolets très élaborés. Ils se sont ensuite attaqué aux avirons en hêtre, avant de débiter et de monter le tableau, le bordage central de la sole, en mélèze, et l’étrave en chêne – les essences traditionnelles sont respectées. La structure transversale du s’ciopon est composée de dix-huit couples en chêne, avec une maille de 24 centimètres. Les râbles mesurent 30 centimètres aux extrémités et un mètre au maître-bau, pour une largeur de 4,2 centimètres et une épaisseur de 3 centimètres. Les fonds sont mis en forme selon la méthode vénitienne, à l’aide d’un chalumeau. Une fois posés le bordé des œuvres mortes et les galbords, puis les dernières finitions, calfatage et peinture, achevés, Laguna a été mis à l’eau le 22 mai.