Le 26 juin dernier, le président turc Recep Tayyip Erdogan a posé la première pierre de l’un des six ponts qui traversera le « Kanal Istanbul », qui reliera la mer de Marmara à la mer Noire du côté européen de la ville d’Istanbul. Long de 45 kilomètres, large de 275 mètres et d’une profondeur de 21 mètres, ce projet phare mis en avant par le chef de l’État depuis 2011 pourra accueillir les superpétroliers VLCC (Very Large Crude Cruisers), et devrait permettre de désengorger de 90 pour cent le détroit du Bosphore, selon Erdogan. Le chantier, au budget estimé à 15 milliards de dollars, est fortement critiqué par le maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, du parti d’opposition de centre-droit CHP, qui craint pour l’approvisionnement en eau de la ville. Le canal sera en effet creusé dans une zone boisée, traversée par de nombreuses rivières connectées au réseau d’eau d’Istanbul depuis le XVIIe siècle.
Par ailleurs, les scientifiques soutiennent que le canal pourrait aspirer les eaux polluées de la mer Noire jusque dans la mer de Marmara. Selon Erdogan, en évitant que les navires ne stationnent devant le Bosphore avant de l’emprunter, le canal permettrait de réduire les épisodes de prolifération en mer de Marmara, sous l’effet combiné de la pollution et du changement climatique, d’une mousse visqueuse régulièrement observée ces dernières années.
Les détracteurs évoquent aussi la question de la rentabilité d’un tel équipement : en effet, une baisse continuelle du trafic dans le Bosphore a été observée. D’autant que la taxe dont il faudra s’acquitter pour emprunter le Kanal Istanbul pourrait freiner les armateurs : s’il présente des risques, le passage par le Bosphore, lui, devrait rester gratuit.