Créatures sous-marines fantasmagoriques et autres submersibles imaginaires ont envahi Rochefort en trois lieux à la fois, le temps de trois expositions de l’artiste Elsa Guillaume (CM 315).
À la Corderie Royale, Bathys-kaphos est une déambulation en profondeur, à la scénographie énigmatique… Les visiteurs découvrent une série de « nautiloïdes » de verre soufflé, engins aux airs de méduses à hélice réalisés avec les artisans du Centre international d’art verrier de Meisenthal. On part ensuite en plongée dans une installation vidéo avec une création sonore à base d’enregistrements marins de la compositrice Christine Groult. Dessins originaux et sculptures en céramique sont installés sous le kiosque inversé d’un bizarre bathyscaphe en suspension. Un des sous-marins de verre s’est échappé de la flottille des nautiloïdes et a vogué jusqu’à l’Hôtel de Cheusses, qui appartient au Musée national de la Marine. L’engin est installé dans un petit cabinet tout repeint d’un bleu abyssal, juste à côté du modèle du sous-marin Plongeur, construit à Rochefort en 1863. Ce dernier inspira, dit-on, le Nautilus à Jules Verne quand il le découvrit à l’Exposition universelle de 1867.
À l’École de médecine navale – autre site du Musée de la Marine – l’artiste a multiplié les installations au cœur des collections qui l’ont inspirée, dans les vitrines et les bibliothèques du vénérable établissement. Ici, entre écorchés, planches naturalistes, et rayons chargés de souvenirs, des matrices gravées à l’eau-forte de cartes imaginaires et une série de sculptures de grès blanc évoquent l’envers des voyages, non-dits et rêvés… Créatures marines anthropomorphiques, corps mêlés aux vagues, coraux dotés de visages spectraux et même récifs à yeux d’hommes – des prothèses oculaires émaillées. Un travail sur l’empreinte et l’absence, ressuscitant en blanc les ombres perdues de ceux qui ont peuplé ce cabinet des curieux trésors d’au-delà des mers.
Collecter les ombres, mesurer l’écume, à l’ancienne École de médecine et à l’Hôtel de Cheusses ; Bathyskaphos, à la Corderie Royale, Centre international de la Mer, jusqu’au 31 décembre.
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Pour en savoir plus Elsa Guillaume, le Chasse-Marée lui a consacré un article dans son numéro 320, publié en avril 2021 : Elsa Guillaume, tritonnades et cœlacanthe
Fascinée par les créatures sous-marines, plongeuse passionnée, Elsa Guillaume modèle dans la terre un bestiaire fantasmagorique, où l’homme le dispute au poisson ou au poulpe, allant et venant entre l’aérien et l’aquatique. Hybrides, ambigus, ses doux monstres témoignent de la puissance d’un « sentiment océanique » joyeux, et volontiers facétieux. le triton et le cœlacanthe, l’amphibien et le poisson des temps premiers, avec ses allures de quadrupède, sont les figures tutélaires de ses plus récents travaux.