Depuis 2018, l’Institut flamand de la mer (VLIZ), basé à Ostende en Belgique, organise une collecte participative de coquillages sur une bande du littoral de la mer du Nord. Objectif : dresser un inventaire des espèces et mieux comprendre le fonctionnement de leurs écosystèmes. « Les coquillages sont des indicateurs de l’état de santé de la mer. Ils témoignent des perturbations liées au réchauffement climatique, à la pollution ou à l’introduction d’espèces exotiques », explique Jan Seys, porte-parole de l’Institut. Le 23 mars dernier, 2 100 personnes ont passé au peigne fin près de 400 kilomètres de côtes, en Belgique, aux Pays-Bas et en France. Au total, 114 000 mollusques bivalves et autres gastéropodes ont été collectés et identifiés.
À Leffrinckoucke et Zuydcoote, les deux seules communes françaises à avoir participé à l’opération, une centaine d’habitants, seau à la main, ont sillonné la laisse de mer. Baudoin Vylck, 71 ans, connaît le littoral comme sa poche. Bénévole aux Messagers de la mer, un groupe qui mène des actions de prévention pour la protection de l’espace maritime, il a assisté ce matin-là les ramasseurs. « Le but est que chacun collecte des coquillages échoués avec la marée sur la laisse de mer. On va alors tracer une spirale autour d’un point fixe et collecter tous les spécimens, entiers et non cassés, qui se trouvent à l’intérieur », explique-t-il.
Agenouillées dans le sable, Louise et Juliette, deux sœurs de 10 et 8 ans, remplissent leur seau en quelques minutes. « On n’aurait jamais imaginé en trouver autant. Et de plusieurs espèces différentes », s’étonnent-elles. Palourdes, couteaux, coques, moules, tellines, huîtres, littorines… sont ensuite classés par espèce. Leur identification n’est pas chose aisée. Une feuille détaille leur nom scientifique en latin. « C’est quoi déjà la Ruditapes philippinarum ? Et la Mimachlamys varia ? », s’amuse cette ramasseuse. Seul un expert peut savoir qu’il s’agit de la palourde japonaise et du pétoncle noir…
Au total, trente-trois espèces ont été identifiées, parmi lesquelles le couteau américain, ramassé en grand nombre. « C’est une espèce non indigène qui est arrivée chez nous avec un bateau de commerce dans les années 1980 et qui depuis prolifère sur nos plages, au détriment des quatre espèces locales de couteaux. Ce n’est pas bénéfique pour le milieu car il y a une perte de biodiversité et une menace de disparition », déplore Hugo Baron, responsable de la mission Littoral au Centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE).
Arnaud Guiguitant
Publié dans Le Chasse-Marée 339 – Juin-Juillet