L’ampleur désastreuse de la pollution océanique par les plastiques commence à être connue. Il est temps : selon les estimations, de 9 à 24 tonnes de plastiques sont rejetés en mer à la minute. La masse totale devrait dépasser, en 2050, celle de tous les poissons vivants. Moins d’un pour cent de ces déchets reste en surface : le nettoyage des mers est un mirage, voire, de la part de ceux qui le promettent, un mensonge. Réduire les rejets, voilà un premier enjeu. À cette fin, en particulier dans les pays où le traitement des déchets est problématique, la solution passe par un changement de paradigme. En amenant les gens à considérer les plastiques comme des ressources, et non comme des déchets, on les engage aussi à les utiliser et à les valoriser.
C’est le credo de Plastic Odyssey, fondée par un jeune officier de marine marchande, Simon Bernard. Plastic Odyssey promeut des techniques et dispositifs de recyclage en vue de la réutilisation du plastique, mais aussi pour la production de carburant. Le procédé, qui repose sur la pyrolyse des plastiques, la catalyse des produits et leur condensation fractionnée, permet de produire près d’un litre de carburant par kilogramme de plastique (trois quarts de diesel et un quart d’essence). Les gaz restants sont brûlés pour alimenter en énergie le dispositif, qui ne nécessite pas d’apport énergétique supplémentaire. Tout ceci n’est pas nouveau, mais Plastic Odyssey cherche à mettre au point des unités de transformation de petite taille, de façon à multiplier les installations de traitement des déchets. Ces machines pourraient tenir dans un conteneur standard. Pour éprouver ces techniques, et faire progresser les idées qu’ils défendent, les membres de l’équipe ont conçu avec leurs partenaires, à commencer par l’architecte Marc Van Peteghem et le navigateur Roland Jourdain, la propulsion d’un catamaran de 25 mètres à partir des plastiques non recyclables récoltés lors des trente-trois escales d’un tour du monde au cours duquel leur navire doit se faire l’ambassadeur du recyclage plastique.
Le navire sera affrété et transformé en partenariat avec l’armateur lorientais Ship as a Service, évidemment dans une perspective de sobriété et de propreté. Il embarquera, outre le dispositif de production de carburant, un atelier de recyclage comprenant des machines de broyage, compression, extrusion, et moulage par injection.
Les expérimentations, basées sur la transformation à la base Explore, de Roland Jourdain, à Concarneau, d’un Tornado, catamaran de 6 mètres permettant de modéliser grossièrement le navire final à l’échelle 1/4, sont en cours. Le chantier proprement dit devrait commencer fin 2018, et le tour du monde, avoir lieu entre 2020 et 2023.