La découverte du navire d’Oseberg en 1904 en Norvège est un événement archéologique majeur lié à l’ère viking. Cette unité de 22 mètres de long pour 5 mètres de large, très bien conservée, était le monument funéraire de deux femmes de haut rang, entourées de nombreux objets.
Parmi eux se trouvaient des fragments de tapisseries. Ces étoffes en laine, soie et lin, datées de 834 de notre ère, représentent l’un des trésors textiles les plus importants de la période. Leurs motifs, des figures humaines et animales, suggèrent des scènes mythologiques et rituelles, ainsi que des combats. Mais les interprétations de ces images varient, d’autant qu’elles sont peu lisibles à cause de l’état des fragments, enterrés depuis plus d’un millénaire sous 6 mètres d’argile, de tourbe et de plumes – probablement issues des lits de la chambre funéraire. S’ils les ont certes protégés, ils les ont aussi compactés, rendant la récupération et l’analyse des textiles extrêmement délicates.
Dans le cadre du projet TexRec, financé par le Conseil de la recherche de Norvège, les scientifiques ont développé un logiciel apte à photographier chaque fragment et à les réorganiser numériquement. En augmentant le contraste des images, les motifs sont plus visibles à l’œil. Les archéologues peuvent aussi détecter des similarités dans les techniques de tissage et les styles des fragments, suggérant les morceaux qui pourraient appartenir à une même pièce. En revanche, si l’équipe utilise aussi une intelligence artificielle pour résoudre le puzzle, c’est avec beaucoup de prudence : l’IA se nourrit de modèles pour apprendre… mais les textiles de l’ère viking ne sont pas légion.
Ce projet révèle déjà des aspects méconnus de la culture viking, tandis que le travail effectué avec la technologie moderne laisse imaginer d’autres applications, notamment dans la valorisation du patrimoine culturel. Iness Bernier
Publié dans Le Chasse-Marée 342 – Décembre 2024-Janvier 2025