Jusqu’au 31 décembre 2021, le musée national de la Marine à Toulon présente la remarquable exposition Plongée, contre-plongée : les sous-marins dans l’objectif. Conçue par Lucie Moriceau, de l’Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense, pour les vingt-troisièmes Rendez-vous de l’histoire de Blois (octobre 2020), le parcours propose des photographies et des extraits de documentaires plongeant le visiteur dans l’univers des sous-marins et dans la vie de leurs équipages, de la Première Guerre mondiale au temps présent.
L’un des films proposés à Toulon est un making of du Chant du loup (2019) d’Antonin Baudry, qui a connu un succès critique – trois nominations aux César, dont celui du « meilleur premier film » – et populaire – 1,4 million de spectateurs en quelques semaines – inédit pour un « film de guerre » français, maritime de surcroît. Si l’on peut regretter l’absence ici de Sous-marin (2006), tourné pendant quatre mois à bord de La Perle par le photographe et peintre de la Marine Jean Gaumy, le genre comporte une filmographie impressionnante : Torpilles sous l’Atlantique (Dick Powell, 1957), Operation Petticoat (Blake Edwards, 1959) l’indémodable Das Boot (Wolfgang Petersen, 1981, photo ci-contre), les blockbusters américains des années 1990 comme À La Poursuite d’Octobre rouge (John McTiernan, 1990) ou USS Alabama (Tony Scott, 1995)… On pouvait craindre que la fin de la guerre froide ne coule par le fond le film de sous-marin : il n’en fut rien. Dans une sorte de perestroïka cinématographique, le submersible russe, naguère redoutable et redouté, est devenu un sinistre cercueil d’acier, comme dans le K19 (2002) de Kathryn Bigelow ou le Kursk (2018) de Thomas Vintenberg.
Avec Le Chant du loup, le terrorisme s’invite à bord : en mettant aux prises d’héroïques marins français avec une frégate iranienne et un sous-marin jihadiste, le Timour III, Baudry opère une spectaculaire mise à jour historique et politique, tout en respectant les codes du genre : bruit du sonar traquant sa proie, fuites intempestives d’eau de mer ou de vapeur, scènes propres à rendre claustrophobe tous les spectateurs, angoisse du déchaînement des enfers (nucléaires), vacillement des hommes face à la mort… Alors, le film de sous-marin est-il insubmersible ? Cela dépendra surtout du talent des auteurs qui choisiront de se plonger dans cet exercice de style, maritime et cinématographique. Vincent Guigueno