En 1967 Éloise II quitte le port de La Rochelle. Son Skipper Fernand Hervé vient de céder son magnifique plan Sergent à une bande de copains normands qui créent, à dix actionnaires, la copropriété Éloise II. Le yawl bermudien, initialement basé au Havre puis à Cherbourg, est maintenant ancré à Port-Louis en rade de Lorient.
Lors du Trophée Fernand-Hervé organisé par le Yacht-club classique de La Rochelle, la copropriété Éloise II a fêté son jubilé. Depuis cinquante ans, cette structure en indivision, composée de dix actionnaires à parts égales, si elle a pu vivre des moments houleux, a toujours réussi à trouver une solution aux différents problèmes, qu’ils soient humains ou matériels. Elle a permis et permet encore de conserver en bon état un fleuron du yachting classique de la côte atlantique, qui parcourt quelque 3 000 milles chaque saison.
Cette forme originale de fonctionnement est dictée par un règlement intérieur qui en fixe les règles. Au cours de deux réunions annuelles, les investissements sont décidés et budgétés. Un planning des travaux est défini, les copropriétaires en réalisant eux-mêmes une bonne partie lors de l’hivernage du bateau. Un planning d’utilisation définit les trois semaines pendant lesquelles chaque copropriétaire pourra disposer du voilier à sa guise pour la croisière, les rallyes ou les courses. Le renouvellement des copropriétaires lors de cession de parts est également prévu : le vendeur présente un candidat qui doit être coopté par deux autres actionnaires et sera définitivement admis après une période d’essai d’un an. Dernière règle : le bateau ne peut naviguer sans la présence à bord d’un copropriétaire.
Cette forme de fonctionnement, unique en France, a permis d’assurer la pérennité d’une unité, qui, dans les années soixante, a défendu, souvent avec succès, le pavillon tricolore lors des compétitions de l’Admiral’s Cup courues dans les eaux anglaises. La copropriété a certes évolué en cinquante ans, mais l’état d’esprit basé sur la convivialité et la confiance demeure, et elle a certainement encore de beaux jours devant elle.
Dominique Duchemin