Par Gwendal Jaffry – Le dimanche 24 juin, vers 16 h 30, il faisait si beau que vous deviez certainement profiter du plein air. En tout cas je l’espère. Cela dit, vous étiez peut-être aussi quelques-uns collés devant un écran dans une pièce sombre à suivre l’arrivée de la dernière étape de la Volvo Ocean Race… Le moment était exaltant, fascinant, incroyable (sauf apparemment du point de vue des grands médias qui préféraient alors nous gaver d’anecdotes footballistiques).
Résumons : trois jours plus tôt, au départ de Göteborg et après huit mois de régate autour du monde, trois bateaux étaient en lice pour remporter cette grande épreuve internationale de course au large. Bien parti, Dongfeng, le plus français des voiliers chinois, mené par Charles Caudrelier, choisit bientôt une option pleine de risques qui lui fera accuser jusqu’à plusieurs dizaines de milles de retard sur le leader durant la nuit précédant l’arrivée à La Haye… Et pourtant, le voilier rouge coiffera ses adversaires à seulement quinze milles de la ligne, remportant ainsi l’épreuve. Époustouflant, vous dis-je.
Pour autant, malgré toute l’admiration que j’ai pour ces marins qui savent faire marcher leur bateau toujours au meilleur de son potentiel, en plus d’avoir une incroyable maîtrise de la météo, de la stratégie et j’en passe, je m’interroge sur ce que cette « voile » nous vend. « Life at the extreme » rappellent sans cesse les communicants de la Volvo Race, arrosant les médias d’images de bateaux lancés à plus de 30 nœuds, submergés par les flots… Il y a un an, ce n’est pas sous l’eau mais très au-dessus que nous emmenait la Coupe de l’America, une majorité s’extasiant alors sur le fait que dans quelques années « tous les plaisanciers voleraient ». Mais… tout le monde a-t-il envie de voler (bien casqué) ou de surfer sur les flots (avec une lance à incendie grande ouverte à l’étrave) ? Eh bien figurez-vous que je n’en suis pas si sûr, d’autant qu’il y a fort à parier que la Golden Globe Race qui vient de renaître, comme la Longue Route, ou encore la superbe Race to Alaska, pour ne citer que quelques événements du moment, illustrent une « autre voie ». Car si le planing est jouissif, comme les sensations fortes font partie du jeu, l’art de la lenteur sur l’eau me semble tout aussi important à partager.
Transmettre le doux parfum du goémon et celui de l’iode, le plaisir de la godille entre les cailloux à quelques dixièmes de nœuds de moyenne… En rythme, l’aviron fait sonner sa dame ; au ras de l’eau, la surface des roches crépite quand la mer vient les lécher ; juste au-dessus du sable ou des algues ondulantes, on cherche un banc de lançons ou une sole qui décolle. Et puis, franchement, un des meilleurs moments en mer n’est-il pas quand le vent tombe et qu’on s’essaye à tirer parti de la moindre brise, assis sous le vent pour diminuer la surface mouillée et faire porter la toile, tout en contrôlant un guindant pour ne pas qu’une voile décroche… ? Voilà de belles expériences à tenter cet été, et surtout un univers à partager.