Un réseau de satellites détecte les navires qui ont déconnecté leurs systèmes d’identification, permettant une surveillance accrue des océans.
Beaucoup de navires cessent de transmettre leur position lorsqu’ils s’apprêtent à commettre des infractions, dégazage, pêche illégale ; ils deviennent alors “invisibles”. Nous proposons une solution pour les repérer », explique Cannelle Gaucher, directrice de la communication d’Unseenlabs. Cette société, créée en 2015 par Clément et Jonathan Galic, deux frères employés dans les secteurs de l’aérospatial et de l’aéronaval, s’appuie sur une technologie capable de détecter, par satellite, les signaux électromagnétiques générés par tous les navires, même quand ils coupent les dispositifs indiquant leur position, tel l’AIS (Système d’identification automatique). Depuis le premier satellite lancé par Unseenlabs en 2019, qui ne pèse pas plus d’une dizaine de kilogrammes et n’est « pas plus gros qu’une boîte à chaussures », sept autres sont venus s’ajouter à la constellation de la petite entreprise, en orbite à 500 kilomètres d’altitude, dont le dernier en janvier dernier.
« Nos satellites reçoivent les signatures radio des navires et celles-ci s’affichent sur une carte. Nos techniciens et des intelligences artificielles peuvent ensuite traiter la donnée, notamment en fusionnant ces cartes avec celles fournies par l’AIS. Cela nous permet de voir quel navire a coupé son signal, et où. Nous fournissons ensuite ces cartes à nos clients. » Parmi ces derniers, en premier lieu, les « polices des mers », comme la Marine nationale ou d’autres marines étrangères. « Grâce à ces données, elles peuvent mieux préparer leur action en mer, intervenir sur des infractions qu’elles n’auront pas forcément repérées, que ce soit le passage sans autorisation d’un bateau dans une zone économique exclusive ou dans une zone protégée, ou alors une activité suspecte… »
Mais Unseenlabs s’adresse aussi à des acteurs privés, comme des assureurs, des armateurs, ou tout autre professionnel du monde maritime, qui surveillent ainsi mieux les navires avec qui ils ont des contrats. Ce qui pourrait éventuellement poser problème, en fonction de l’utilisation que font ces acteurs des données de position des navires : « Nos contrats sont très cadrés et nos clients bien choisis », affirme Cannelle Gaucher. Des ONG, comme Global Fishing Watch, travaillent aussi avec Unseenlabs pour alimenter leur base de données sur les « dark ships », les bateaux de pêche illégaux, très difficiles à traquer.
Unseenlabs se présente ainsi comme une sorte d’agent de surveillance pour une mission qui paraît louable… Mais avec quelles limites ?