Les sons, ou clics, émis par les grands cachalots de Méditerranée (Physeter macrocephalus) leur permettent de se repérer sous l’eau et de chasser. Grâce aux travaux de chercheurs grecs en informatique et sciences marines de la Fondation pour la recherche et la technologie-Hellas, ces sons pourraient aussi aider à les géolocaliser pour tenter de réduire le nombre de collisions avec les navires, causes d’une importante mortalité chez les grands mammifères.
Menée par Emmanuel Skarsoulis, océanologue spécialiste de la bioaccoustique sous-marine, l’équipe a immergé à 100 mètres de profondeur dans la fosse hellénique trois hydrophones, reliés à des bouées en surface, espacés de 2 à 3 kilomètres les uns des autres. Les petits appareils accoustiques sont capables de détecter le clic d’un cachalot passant dans un rayon de 10 kilomètres ; par triangulation, les chercheurs peuvent ensuite déterminer la position de l’animal.
Pour connaître sa profondeur, les chercheurs ont exploité le fait que ces clics « rebondissent » à la surface de l’océan avant de redescendre vers le fond. Les hydrophones captent ainsi deux signaux avec un intervalle de temps qui permet à un logiciel, développé par les chercheurs, de calculer la profondeur de l’animal émetteur. En associant ces informations et les données connues sur les cachalots, le programme peut ensuite déterminer leurs futurs déplacements. Grâce à ce logiciel, appelé SAvEWhales (pour System for the Avoidance of Ship-Strikes with Endangered Whales), les navires pourraient être informés qu’ils passent à proximité d’un cachalot ; à eux de dévier leur route ou de ralentir s’il y a risque de collision.
Avant d’en arriver là, il faudrait néanmoins l’améliorer pour permettre de bien distinguer les cachalots en groupe, voire de trouver un moyen de l’adapter aux autres sons émis par les cétacés, car le logiciel ne travaille actuellement qu’avec ceux des cachalots.
Les recherches ayant pour but de réduire les accidents avec les grands mammifères se développent de plus en plus : en France, une équipe composée d’ingénieurs, de professionnels du monde maritime et de scientifiques a ainsi travaillé sur un logiciel permettant aux marins en passerelle de signaler la position d’un cétacé. Les navires « abonnés » au programme reçoivent la localisation, tandis que le logiciel calcule une zone de risque qui évolue dans le temps, en fonction de la position initiale de l’animal et des connaissances sur ses déplacements.
© Franco Banfi/Biosphoto